Depuis le temps que je me disais "il faut que je lise ce bouquin, il faut que je lise ce bouquin..." j'ai enfin sauté le pas, et je vous recommande d'en faire autant, ce livre est un pur régal. Je ne vais pas chercher les quelques (rares) erreurs qui y sont, ni bouder mon plaisir (d'autant que je cale un peu sur Les gommes en ce moment)... Cela reste un essai et non un ouvrage d'histoire, mais si tous les essais et romans historiques étaient de cette qualité, je changerais de métier!
"Où sont mes pantoufles? Jamais le Roi-Soleil ne se serait posé pareille question. Sous son règne, chaque chose se trouvait à sa place, à commencer par lui, monarque de droit divin et solidement ficelé à sa divinité. Comment parvenait-il à respirer, guerroyer, courir les dames et le cerf, pirouetter dans ses ballets? Demandez-le à Philippe Beaussant.
Romancier et musicologue, il a piqué une tête dans le grand siècle, interrogé tous les témoins et filé le roi sans le lâcher d'une semelle. Il a vu la nourrice pénétrer, avant le Lever, dans la chambre d'apparat pour «baiser Sa Majesté au lit», ce que confirme Saint-Simon. Mais Louis XIV a-t-il passé toute la nuit dans ce lit? Vous plaisantez. Le devoir conjugal l'a appelé chez la reine, le goût de la chair l'a guidé vers la favorite du moment. Il dispose de quatre chambres et le valet qui le suit, auquel le relie un cordonnet de soie attaché au poignet, connaît tous les passages secrets. Ainsi les apparences sont-elles sauves, la raison d'être de Sa Majesté.
Le roi joue son rôle comme s'il était né pour l'emploi (ce qui est d'ailleurs le cas), éclatant Molière qui a le privilège de le saluer au réveil, s'offrant en permanence, à table, à cheval, sur sa chaise percée, à l'admiration des siens. Sa raison d'être est de se montrer, il y puise l'énergie qui lui permet, à soixante-seize ans, de tuer une trentaine de faisans et peut-être d'honorer encore cette «appétissante chrétienne» qu'est Mme de Maintenon. De sa virée à la Cour, Beaussant nous ramène un récit aussi fascinant que le modèle, cet homme qui se voulut éblouissant et qui parvint à l'être. A quel prix? Peu importe, il n'avait pas le choix."
par Gabrielle RolinLire, février 2001
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