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Une envie de livres ?

08/08/2012

À la BnF (Richelieu), t'es pas Parisien? Tu crèves !

Mon titre est un peu violent, il est cependant à la hauteur de l'exaspération qui m'a prise le jour où j'ai eu l'idée - tout à fait saugrenue n'est-il pas - de vouloir prendre en photo les 100 pages de registre manuscrit qui me restaient à lire. 

Précisons tout de suite que le manuscrit en question a été écrit par quelqu'un qui n'a plus mal aux dents depuis longtemps. Les droits d'auteur pour un bidulle du 17e siècle, il faut les chercher. 

"Ah mais non Madame c'est-pas-possib'
- Ah? Mais pourquoi, s'il vous plaît?
- Parce que le règlement dit 40 pages maximum.
- ... (long silence et air héberlué) Quel que soit le nombre de pages du manuscrit? Parce que voyez-vous mon manuscrit fait négligemment 1400 pages, pas 140, nan, 1400. Un zéro en plus. 
- Ah oui, mais c'est le règlement. 
(je crois que je vais emplafonner quelqu'un de la BnF un jour, avec leurs règlements, bref)
- 'tendez, 'tendez, 'tendez, vous êtes en train de me dire que je n'aurai jamais droit en tout et pour tout qu'à 40 de mes 1400 pages. 
- Oui. 
- Or donc, comme vous me voyez je quitte Paris, là, je déménage - hypothèse pure -, je ne serai plus toutes les semaines à Paris, donc les archives de [la BnF] Richelieu, pour moi, c'est fini, F I N I ? 
- (air surpris en face de la gentille dame, si si au fond, je suis tombée sur une gentille) Euh... oui. C'est comme ça, c'est...
- oui je sais, merci, le règlement (au cas où je l'aurais oublié, in petto)
- vous êtes sûre qu'il n'est pas numérisé? 
- (grand sourire carnassier) Oui. S'il était numérisé, je ne l'aurais pas sur ma table et je ne viendrais pas depuis des jours et des jours relever page après page son contenu (in petto encore, le masochisme a des limites, même chez un chercheur qui trouve). Bon, alors, qu'est-ce qu'on fait? J'imagine que pour les photocopies c'est la même limite? 
- Oui oui (avec un air désolé). Mais vous avez le service de reprographie.
 - Oui oui oui, mais étant donné leurs tarifs et leurs délais, non, on va oublier, mes frais ne sont pas payés par mon laboratoire. Je suis doctorante et on m'a déjà bien expliqué que si je photocopiais une thèse c'était pour ma pomme. Une fois ça va. Et mon mari n'est pas millionnaire. 300 euros que cela "m'a" coûté il y a 10 ans pour un registre moitié moins grand que celui-ci. Nan, ça ne va pas être possible. Même 100, non merci. Bien. Je vais donc renouveler ma question: qu'est-ce qu'on fait? Est-ce que je peux me mettre dans un coin avec un dictaphone pour ne pas gêner les lecteurs, je relève vite-fait le contenu en murmurant dans mon appareil et...
- ah ça il faut voir avec l'accueil.
- c'est très aimable à vous, l'accueil, j'en viens, ils m'ont dit de venir vous voir. 
- mais vous soyez, ici ce n'est pas possible, il n'y a pas de place ici pour ça. 
- bon. Donc il n'y a aucune solution?
- je suis vraiment désolée, Madame... Mais ce n'est pas moi...
- Oui, je sais bien, ce n'est pas contre vous. Mais ça ne change rien à mon problème"

Là j'ai tourné les talons, de peur de m'énerver. Ça n'aurait aidé en rien, et effectivement elle n'y est pour rien. 

Je suis dans un état de fureur qui m'arrive rarement. Pas tant pour mes 100 pages. Mais pour un autre registre, 800 pages que je pensais benoîtement exploiter après la thèse pour un dossier prodigieux. Je viens d'apprendre que soit je gagne au loto (et auquel cas je peux habiter en région parisienne autre chose que le 2 pièces dans lequel j'étouffe depuis des années) soit à de semblables fins je divorce et épouse un millionnaire (vu le prix des appartements parisiens, il me faudra bien ça sans la moindre exagération), soit encore je m'assoie sur mon projet.

Le truc pompom on the cake, c'est qu'à la BnF Tolbiac, j'ai shooté un imprimé du XVIIe siècle sans que personne ne trouve rien à redire ce qui ne me semble pas anormal. Because droits d'auteurs aussi trèèèès limités, forcément. Et pourtant il y a aussi un service de reprographie qui n'a pas envie de perdre des clients ou je radote? 

Il y a bien une interjection qui me vient à l'esprit mais ce serait grossier. 

Je n'arrive pas à m'en remettre. C'est à peu près aussi hallucinant dans un genre différent que ce qui est arrivé à une amie sur le point d'accoucher et qui disait avoir eu la proposition de colles l'année suivante dans une prestigieuse prépa. Jusqu'au moment où elle a eu l'innocence de dire qu'elle allait avoir un rejeton. Pouf, ah oui mais non, là, non, ça ne serait pas raisonnable de lui proposer des colles l'année suivante dans de telles conditions. 

Alors Mesdames, épousez des millionnaires, n'envisagez JAMAIS de quitter Paris et n'ayez surtout pas de mômes, sinon les portes se fermeront devant vous. 


Heureusement que dans les centres d'archives en provinces (et mêmes aux archives nationales) ils sont moins... moins... Ouais je vais me taire, encore un qualificatif en forme d'oiseau qui me vient à la bouche. Faut dire qu'ils sont souvent déserts, pour les centres provinciaux (au moins ceux que je fréquente), alors si en plus ils font *** les lecteurs...

Je crois que je cauchemarde, là. 

édit: il semblerait - pas encore de certitude - que depuis 10 ans les prix du service de reprographie ont sérieusement baissé, puisqu'il semble que cela fonctionne désormais ou à la page ou par forfait. Mais 90 euros pour un manuscrit que l'on peut prendre soi-même en photo, j'ai quand même du mal. Alors que je suis prête à laisser un exemplaire de mes photos à disposition de la bibliothèque. Bref.
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8 commentaires:

Korgon a dit…

Oh mon dieu comme je suis d'accord avec toi !

Auvergnat, je suis monté à la BNF bossé sur les PO (pièces originales de famille) d'une famille médiévale sur laquelle je travaillais. Un volume de 200 pages, avec plusieurs actes collés par page. je commence mes photos, on m'a fait la même remarque que toi, et on m'a expliqué qu'il fallait que c'était pour protéger les documents.

J'ai alors balancé le raisonnement suivant : environ 300 docs, divisés par 40, 7.5 jours de travail donc. je commande une première fois, 40 photos, je réserve le doc pour le lendemain ; le lendemain, 40 photos, le doc repart en site de classement extérieur, je le recommande ; le surlendemain, 4 photos, mise en réservation pour le sursurlendemain ; etc...
Soit une dizaine de mouvements pour le registre.

J'ai conclu en demandant ce qui représenter le plus de danger, que je prenne mes 300 photos d'un coup, ou qu'on essaie de voir si le camion pouvait avoir un accident, qu'un des gentils chartistes échappe malencontreusement le registre, etc.

La présidente de salle étant intelligente, elle m'a laissée faire mes photos. Ce ne fut pas le cas de mon collègue, dans le même cas, qui n'a jamais pu obtenir son registre.

Bref, tu as totalement raison, la BNF, c'est conçu pour les Parisiens, qui ont le temps à l'année de surmonter les galères que te balancent le personnel de manière narquoise. C'est incomparable avec les AN où ils font tout pour t'aider, t'arranger, où ils comprennent que tu es un étudiant et donc que tu es pas millionnaire, etc.

En revanche, méfiances des les centres de province, ces derniers reçoivent les consignes de Paris, et ça donne des situations cocasses. Par exemple, quand tu commandes une cote, et que le carton qui arrive contient plusieurs docs, on te demande lequel tu veux. Personnellement, j'ai mis deux jours à leur faire comprendre que je commandais des cartons dans lesquels TOUS les actes m'intéressaient.
Les personnes qui édictent les règles sont des gens qui ne connaissent pas les réalités du travail que l'on fait, qui ne conçoivent même pas les avancées technologiques dont nous usons (outre l'APN, que tout le monde utilise désormais, ils font des yeux de carpe ébaubie lorsqu'ils voient un trépied, des poids, un scanner mobile, etc).

On en devient aigri de tout ça ...

Aberlenc a dit…

Non, la BNF n’est pas réservé aux franciliens.

Ce serait alors dire que les archives départementales du Rhône seraient réservées aux lyonnais, et tuttit quanti.

Je suis surpris que quelqu’un qui se lance à l’assaut d’un manuscrit de 1400 pages et ayant semble-t-il un délai limité pour en prendre connaissance et copie, ne se préoccupe de sa reproduction que le dernier jour.

Que la présidente de salle oppose un refus, c’est normal, c’est le règlement, et si on n’applique pas le règlement, il ne sert à rien, et la présidente est en faute.

Ensuite, comme le précise la personne dans le premier commentaire, il faut « négocier », en trouvant les bons arguments, mais aussi tomber sur la bonne personne en présidence de salle. La, c’est la loterie, et c’est l’avantage de venir régulièrement, on sait à qui on peut demander telle ou telle chose, et à qui il ne vaut mieux rien demander sous peine de voir naître une envie de meurtre.

C’est mieux en province ? Je ne pense pas. Déjà, la Bibliothèque est une bibliothèque, qui conserve prioritairement des créations, des œuvres. Les archives, nationales ou départementales, conservent de l’administratif. Ce n’est pas la même chose. Ce n’est pas parce que vous avez pu reproduire intégralement un imprimé du XVIIe à Tolbiac, que vous pouvez faire de même dans une autre salle de lecture. Parce que vous avez brulé un feu rouge un jour sans dommage et sans PV, vous pensez pouvoir bruler tous les feux rouges ?

C’est mieux en province ? Nombre de dépôts départementaux vous jettent désormais à la figure un contrat de licence, parfois tellement mal rédigé que vous êtes en droit de comprendre que vous ne pouvez pas réutiliser des clichés pour un ouvrage, ni même des informations provenant du dépôt, donc une transcription (Seine-et-Marne).

C’est mieux en province ? Il y a longtemps, aux archives du Pas-de-Calais, je demande une cote. Incommunicable, car en mauvais état. Soit. Je commande donc une reproduction microfilm (c’était en 1990). Non monsieur, c’est EN MAUVAIS ETAT ! J’ai adressé une réclamation au directeur, lui expliquant que je comprends qu’un document en mauvais état soit incommunicable. Mais pourquoi en refuser la reproduction, payante ? Pourquoi dans ce cas ne pas jeter ce document puisqu’on ne peut ni le consulter, ni le reproduire ? D’autant qu’en faisant un microfilm à mes frais, un second serait créé pour lé dép^t. Trois semaines après, j’avais mon microfilm.

C’est mieux en province ? J’ai souvenir aux archives de l’Eure, d’un magasinier qui à chaque levée faisait exprès de rapporter une cote non demandée, par exemple E540 au lieu de E 541. Ca l’amusait, et les locaux le savait, ne s’en formalisaient pas. Mais le chercheur lointain, francilien ou nordiste ou pyrénéen, il faisait comment ?

Sinon, Paris et les sept départements environnants ont un nom qui n’est pas région parisienne, mais Ile-de-France. Parle-t-on de l’Alsace ou de la région strasbourgeoise ? De la Bretagne ou de la région rennaise ?

Quant à débarque dans une salle de lecture avec un trépied, des poids ( ?????), un scanner mobile (donc une photocopieuse), que dire ? Ha oui, Lol, mdr et toutes ces sortes de choses !

la Souris des archives a dit…

"Je suis surpris que quelqu’un qui se lance à l’assaut d’un manuscrit de 1400 pages et ayant semble-t-il un délai limité pour en prendre connaissance et copie, ne se préoccupe de sa reproduction que le dernier jour."

Si vous m'avez bien lue, j'espérais boucler l'intégralité durant la période prévue. Donc les derniers jours, voyant que cela risquait de ne pas être possible, j'ai cherché simplement une solution de repli.

Il y a quand même quelque chose de très incohérent dans votre message: vous dites qu'un règlement doit être respecté mais qu'en même temps, il faut choisir le bon président de salle etc. Ce n'est pas très logique. Ou l'on est respectueux du règlement logique ou illogique ou on ne l'est pas. Je n'ai jamais eu l'ombre d'un problème avec le règlement pourtant très exigeant des archives nationales, parce qu'il est cohérent, ce qui n'est absolument pas le cas de celui de la BnF selon les sites. Pour le reste, la différence avec la province, j'ai parlé des centres que je fréquente. Je n'ai aucune raison de dire que partout ailleurs c'est aussi bien.

Quant au trépied, c'est tout à fait ordinaire d'en apporter un aux archives nationales...

Aberlenc a dit…

Non, miss Souris des archives, il n'y a rien d'incohérent.

Il y a un règlement, et la personne que vous avez eu comme interlocutrice a appliqué le règlement, c'était son devoir.

Mais le lecteur, la lectrice tente toujours d’arriver à ses fins, donc à contourner les règles.

Et à coté du règlement, il y a l'humain, la relation humaine, qui permet parfois de contourner certaines dispositions contraignantes.

Certains l'applique sans discernement, d’autres savent prendre en compte les situations diverses et variées.

Vous ne pouvez pas comparer le règlement des Archives nationales (enfin celui du site de Paris je pense), que vous trouvez cohérent car il vous permet de photographier sans limite, aux règles propres chaque département de la BNF.

Quant au trépied, c'est tout à fait ordinaire d'en apporter un aux archives nationales dites vous ? Certes, mais là, vous êtes à la BNF.

Chaque établissement est libre de son règlement. A nous lecteurs de nous adapter.

Anonyme a dit…

Ahhhh.... Moi j'appelle ça "le bakchich du sourire". Où comment se forcer à être sympa, attentionnée, souriante, enjouée, voire veule pour que les personnes en salle vous accorde, par gentillesse, ce qui est théoriquement interdit. J'ai fini, comme ça, par aller choisir moi même mes microfilms dans les tiroirs des estampes à la BNF, la dame m'ayant accordé sa totale confiance sur la base de mon côté avenant. Ou par aller direct enregistrer des pièces non côtées dans les rayons.
Mais la frontière est mince, j'en convient, et quand on tombe sur une personne levée du mauvais pied, ça déconne...

la Souris des archives a dit…

@ Aberlenc: ah non! Le règlement des AN (site de Soubise) est cohérent parce que par exemple, on n'a pas le droit d'entrer avec autre chose que des feuilles volantes, pas de manteau, pas de grandes poches, ça c'est cohérent. C'est aussi cohérent parce que le but est que les lecteurs puissent consulter et étudier les documents, donc tout est fait dans ce sens. En revanche, à la BnF, selon les sites, les conditions de la consultation d'un manuscrit de la *même époque*varient énormément. Ça c'est absurde.

Anonyme a dit…

Pour mes 15 volumes de 300 feuillets, également du XVIIème, dans le même lieu, j'ai eu aussi ce type de problème. Quand on y va régulièrement, on remarque que les conservateurs changent environ toutes les 2 heures. Tous ne s'intéressent pas à la règle des 40 pages. C'est ainsi qu'en une journée, j'ai réussi à prendre 300 photos... Avant qu'à 17h, une conservatrice un peu tatillonne découvre le pot au rose (avec les duplicata des demandes de prise de vue). Le mal était fait et tout était déjà bien rangé sur mon ordinateur.

la Souris des archives a dit…

Mais ce genre de règlement (qui ne se justifie pas réellement s'il n'y a pas d'autres lecteurs en attente de la place réservée à la photographie) ne se justifiant pas, c'est en effet un pousse-au-crime... Forcément !