Oui, bon, d'accord. L'accroche est grossière, elle a la finesse d'un politique à l'ignorance encyclopédique s'essayant aux références historiques. C'est lourd, c'est énorme même.
L'ignorance encyclopédique, cette formule n'est pas de moi mais d'un de mes anciens professeurs. Il faisait ainsi référence à l'admirable sortie d'une certaine Ségolène R. vers la fin des années 1990 quand elle avait cru bon de rappeler que pour l'Église du Moyen-Âge les femmes n'avaient pas d'âme. En général, quand on cite quelque chose de mémoire, on exagère. J'ai cru que ma mémoire me faisait exagérer. Là, non, la phrase d'origine était pire encore:
Le 9 janvier 1998, lors du journal de vingt heures sur France 2, Ségolène Royal, alors ministre de l’enseignement scolaire, stigmatise les réticences de l’Académie française à l’égard de la féminisation des titres et des noms par cet argument: « Cela me fait penser aux interrogations du concile de Trente qui se demandait si les femmes avaient une âme »
Il faut s'estimer chanceux, pour une fois, ce n'était même pas le Moyen Âge qui s'en prenait plein la gueule, c'était le XVIe siècle (oui le concile de Trente c'est bien au XVIe siècle...).
Soit dit en passant, non le concile de Trente (le concile de la réforme catholique, répondant aux réformes protestantes mais pas que) ne s'est pas du tout penché sur l'âme des femmes mais, pire encore, l'Église n'a jamais discuté sur ce fait. Tout au plus lors du concile de Mâcon en 585 (oui, ça date, je sais) se produisit un incident, raconté de la manière la plus savoureuse qui soit par mon Grég, enfin, Grégoire de Tours, évêque du VIe siècle (et auquel je dois ma très chouette note au CAPES. Depuis je l'aime). J'aime particulièrement la manière dont il rapporte ce qui s'est passé ce jour-là:
« De plus, on confondit lors de ce synode un évêque qui prétendait que la femme ne peut pas être appelée être humain (mulierem non posse dici hominem). Voilà bien une question sérieuse et digne d'être discutée dans un synode. Moi, j'aurais mis cet évêque à garder les porcs. Car si sa mère n'était pas un être humain, il était apparemment né d'une truie"
Et toc! Évêque machin-truc 0, mon Grég 1!
En gros, comme mon Grégounet, les hommes du Haut Moyen-Âge maîtrisaient mal le latin; il y a eu des discussions à base de "Dites, les potes, un homme, ça se dit comment en latin? Vir ou Homo? ".
Les femmes ont donc une âme, sur ce point, l'on est rassuré. Néanmoins, comme elles appartiennent bien au genre humain, on compte un paquet de cruches dans leurs rangs. Le pire est atteint quand elles briguent envers et contre tout une présidence. Je ne cultive aucune solidarité liée au genre (bouh! Le mot à ne pas prononcer ces temps derniers...) donc je peux me permettre ce vilain jugement pas gentil.
À propos de genre, j'ai bien aimé les réactions horrifiées de quelques politiques, récemment, à propos du supposé enseignement inspiré par les gender studies au lycée. J'ai eu l'étonnement de voir des centaines de personnes s'étriper sur la place publique sur un sujet... étudié à l'université par les historiens notamment et à l'origine de nombre de publications passionnantes, sans que cela ne fasse de bruit. Remarquez, l'objectif du chercheur n'est pas nécessairement de prendre parti, surtout à partir de ses opinions personnelles. En revanche, on ne refuse aucun problème a priori. Ensuite, cette notion, familière aux historiens, les intéresse surtout sous un angle précis. Il s'agit, très grossièrement, d'étudier les codes culturels qu'une société attribue à chaque sexe. J'ose espérer que personne n'ira nier que selon chaque sexe, un comportement est attendu par une société et une culture données. Enfin, dans la mesure où un enseignant parle bien de théorie, je ne vois pas le problème. Encore moins quand arrive l'information selon laquelle il ne s'agit pas d'un paragraphe des programmes officiels mais... d'un manuel. Et une fois de plus, une polémique qui fait pschiiiit... Ce qui demeure, c'est que la bêtise n'a pas de parti, au cas où l'on en doutait (je n'aurais pas dû lire les commentaires sur les sites d'informations, je n'aurais vraiment pas dû...).
À propos des femmes, de leur histoire, de leur place dans la société, une lectrice, Sofia, me demandait quelques références à propos du statut de la femme dans l'Eglise catholique durant le bas Moyen Âge. Las, j'avoue n'être pas très au point sur ce sujet. Mon réflexe primaire me ferait lui conseiller d'abord ce classique:
- Christiane Klapisch-Zuber (dir.), Histoire des femmes en Occident, Paris, Perrin, 2002 (un grand classique sous la direction de G. Duby et M. Perrot).
et de partir éventuellement de la bibliographie pour aller plus loin.
En fait je ne crois pas qu'il y ait une spécificité dans le traitement des femmes par l'Église au bas Moyen Âge (soit vers le XIVe-XVe siècles). L'apparition des béguines dans les Flandres leur a t-elles donné davantage de liberté? Je ne vois rien d'autres. Bien sûr quelques figures éclatantes, comme Christine de Pisan. Alors d'autres références dans lesquelles j'espère que Sofia et d'autres trouveront leur bonheur:
- Françoise Thébaud, Ecrire l'histoire des femmes et du genre, Paris, ENS, 2007
- Michelle Perrot, Les Femmes ou les Silences de l'Histoire, Paris, Flammarion, 2001.
- Jean-Marie Mayeur, Charles Pietri, André Vauchez et M. Venard, Histoire du christianisme, tome 6 : Un temps d'épreuves, 1274-1449 (énorme mais passionnante qui va souvent bien au-delà de la seule histoire religieuse)
- Françoise Autrand, Christine de Pizan, Paris, Fayard, 2009.
- Patrick Carlot et Éric Gasparini (dir.), La femme dans l'histoire du droit et des idées politiques / XVIe-XIXe siècles, Dijon, Éditions universitaires de Dijon.
- Patrick Carlot et Éric Gasparini (dir.), La femme dans l'histoire du droit et des idées politiques / XVIe-XIXe siècles, Dijon, Éditions universitaires de Dijon.
Bonne lecture !
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