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Une envie de livres ?

14/06/2010

Champagne !


Après quatre bonnes années de recherches assidues dans les fonds d'archives, j'ai trouvé le graal ! Faites sauter les bouchons !

Non, en vrai, des graals j'en ai trouvé pas loin d'une dizaine, sans compter tous les petits et gros corpus prodigieux. Oui-mais-là-ce-n'est-pas-pareil. Ce matin, j'ai eu entre les mains des textes que je croyais perdus à jamais.

Un érudit à la fin du XIXe siècle avait publié une série d'actes notariés concernant de grands noms du XVIIe siècle. Sans indiquer systématiquement le nom du notaire. Sinon, ce n'est pas drôle. Je savais donc qu'à la fin du XIXe siècle mon graal suprême existait. Vous me direz, "donc, s'il a franchi le XIXe siècle, c'est tout bon!". Erreur. Toutes sortes de choses peuvent arriver à des archives. Des incendies (on a ainsi perdu une grande partie de la législation française ancienne au XVIIIe siècle), des inondations, des rats et des vers (c'est charmant de retrouver la trace de ces petites bêtes dans l'épaisseur d'un volume), l'incurie des hommes... Heureusement, les notaires ont l'obligation désormais de verser leurs actes anciens aux archives nationales ou départementales. Même si ça, c'est le théorie. Il est arrivé il y a moins de vingt ans que des siècles d'archives notariales partent à la benne en papier à recycler (ne me cherchez plus, là, je viens de frôler la crise cardiaque à cette seule idée). Le pire, c'est que c'est vrai. Hahummm.

Bref. Tout cela, c'est sans compter avec les pilleurs d'archives. C'est un type de pillage un peu moins sexy que celui des tombes égyptiennes, mais pas moins redoutable (j'échange une momie qui sent mauvais contre les actes notariés de Louis XIV). On a retrouvé et on retrouve par conséquent sur le marché de petits dossiers, élégamment présentés, contenant des actes notariés divers. De jolies pièces pour amateurs de curiosités anciennes. Le dossier ici photographié renferme le testament d'un maître boulanger au temps d'Henri IV, avec le détail de ses pompes funèbres. Il a été prélevé dans les archives notariales uniquement pour assouvir le goût de certains pour l'exotisme d'une plongée dans le vieux Paris. Objectif extraordinairement utile, n'est-il pas?


Et comme les tombes égyptiennes, ce sont les études notariales où les souverains français ont fait enregistrer leurs actes qui ont été les plus visitées. Là où il faut un à deux cartons par an pour contenir les pièces d'un an d'activité, on se retrouve avec un pauvre carton pour six ou huit ans. La misère. La cerise on the cake, c'est quand des archives ont disparu à la suite d'une publication qui donnait les références des actes. Ce qui s'est produit dans les années 1920-30.

Pour en revenir à mes moutons, je pouvais craindre le pire. Et en fait, non. Mes hypothèses successives ont été plus ou moins bonnes. En gros, je me suis dit que si Me Machin a été le notaire de Mazarin, lequel ayant été très proche, mais alors très proche d'Anne d'Autriche, avec un peu de chance, dans la même étude que je trouverai les actes de ladite Anne. Je n'ai pas trouvé les actes de la reine mais de son rejeton. Si ça, c'est pas un graal, je rends mon crayon à papier ! J'avais renoncé ou presque à l'idée de retrouver le notaire de mon p'tit Loulou. C'était un tort (que l'on écrit avec un t car le tort tue, nom d'un chien!).

Alors ma mission est accomplie. J'attends les ordres du chef - le patron alias le grand manitou - mais je crois qu'il est content, mon colonel ! (Deezer n'a même pas en stock La Vie parisienne, pauvre Offenbach... mais heureusement j'ai trouvé mon bonheur en vidéo!)

Ah, j'oubliais. Si vous retrouvez dans votre grenier des documents de votre grand-maman racontant son quotidien ou autre chose utilisable peut-être par les historiens, par pitié, allez les proposer aux archives départementales du coin... Et ne bradez pas ça à des sinistres marchands !


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12/06/2010

Devenir canard


Ce matin-là, je n'en savais rien. J'étais encore pleine d'illusions, persuadée que faire de la recherche en histoire c'était un vrai bonheur, et le partager, ce bonheur, encore plus. Bon, d'accord, parfois on est un peu fatigué de ne pas avoir de poste fixe, de devoir tous les ans faire cinquante dossiers, et croiser les doigts pour que le téléphone sonne, qu'une université vous appelle. Il peut arriver d'être fatigué de passer un mois entier sur des calculs et de se rendre compte que l'on doit tout recommencer. Il y avait une erreur dans le registre. Fatigué d'une journée de travail, et pourtant aimer ce que l'on fait. Mais fatigué quand même.

On le dit. Visiblement trop.
C'est alors j'ai compris l'intérêt d'être canard. Vous me direz, quel est le lien entre les deux? Le lien, c'est "laisser couler" (sans réagir) comme la pluie coule sur les plumes du canard. Oui mais laisser couler quoi? Des phrases comme celles-ci:

"Alors, ta thèse, tu en es où? Difficile de s'y mettre, hein?"
Alors que l'on y bosse du matin au soir. Soupir.

Ou encore
"Quoi ? Tu n'as pas le temps d'adopter un clavecin ? Moi pendant ma licence, je m'occupais de mon bébé, je faisais partie d'un groupe de rock, ça m'a jamais empêché de vivre! Arrête de te chercher des excuses!"

Variante "Moi, mon frère il a fait sa thèse de physique en trois ans, et il avait même le temps de faire de la varappe".

Et enfin "Ma fille, elle a fait sa thèse en trois ans! Même que son directeur n'était pas d'accord, mais elle est courageuse, alors elle l'a terminé quand même en trois ans"
"Et ? Elle a été habilité***?"
(silence gêné) "Non. Mais c'est parce que son directeur était un imbécile".

Ben voyons.

Cela peut venir d'un père ou beau-père, d'une mère ou d'une belle mère, d'un frère, une soeur, un ami. Cela peut arriver dans tous les métiers. Je me demande si ce n'est pas plus perfide encore quand on fait de la recherche. Une cousine s'est bien vu déclarer par une employée d'une crèche: "Mais Madame, vous n'avez pas besoin d'une place en crèche, vous êtes chercheuse, et tout le monde sait bien que les chercheurs, ça ne fout rien!". Je vous laisse imaginer la tête de la cousine.

Toujours des gens bien intentionnés (n'est-ce pas), qui sont persuadés qu'au fond, si vous vouliez, vous l'auriez déjà terminée cette thèse. Si vous ne la terminez pas, ou si vous mettez un peu de temps, c'est que vous le voulez bien.

Ou encore si vous avouez, honte suprême, ne pas avoir beaucoup de temps libre, préparez votre métamorphose en canard. Foi de thésarde, c'est la seule solution pour ne pas se laisser abattre. Laissez glisser.

Et in petto, ajoutez si vous voulez, "Rigolera bien qui rigolera le dernier".

Inutile de leur expliquer à ces braves gens plein de bonnes intention que comparer des choux et des carottes, c'est con. En d'autres termes, comparer deux thèses dans deux domaines différents, quand on n'y connaît rien, c'est complètement crétin.

Que c'est tout aussi crétin de comparer un thésard qui à mi-temps enseigne et à mi-temps fait sa thèse (en cinq ou six ans) avec un thésard qui est à plein temps dans son labo.

Ce n'est pas qu'ils sont cons, ni crétins. Ils font comme tout le monde. Causer de ce qu'ils ne connaissent pas, pétris de bonnes intentions, sans envisager de pouvoir faire erreur.

Devenez canards, ou apprêtez-vous à le devenir, jeunes Padawans, assez inconscients pour vous jeter dans une thèse de Sciences humaines !

Mais je dis canard comme on pourrait dire stoïcien. En plus, ça fait chic, stoïcien, ça vous rapprochera de Louis XIV. Ni plus ni moins. Ce n'est pas moi, c'est Stanis Pérez qui l'a dit (là, on s'incline. J'adore ce type. Enfin ses articles).
Qu'est-ce que le stoïcisme? Voici la définition donnée par Guy Thuillier (encore un historien):

C'est une sorte de vision que l'on possède à un certain âge, qui est liée à une certaine expérience de la vie, à une certaine usure parfois: elle donne une certaine maîtrise de soi, elle permet de faire face à la souffrance, à l'échec, aux épreuves, à la peur, d'éviter la tyrannie de l'action, de prendre ses distances, elle donne des règles de vie pour le quotidien - ce qui n'est pas négligeable: l'habileté à prendre ses distances, à être indifférent, à résister à un malheur peut être d'un grand secours, le stoïcisme coutumier fournit une armature morale, et dans un métier éprouvant, ingrat, exigeant, il apporte des fondements solides à la vie intérieure en fixant les règles du jeux, en montrant les objectifs possibles - être libre, indifférent (aux passions), indépendant - qui permettent de trouver son chemin et donnent une certaine assurance.

C'est sans doute là l'effet pervers de la réforme des thèses. Trois ans, oui, durée "normale". Mais durée qui n'a de sens que si l'on fait à plein temps sa thèse. Personne n'a envie de se lancer dans une thèse - après s'être assuré un emploi pour manger, soit vers 26 ou 30 ans - et à cet âge, de vivre avec moins que le SMIC, quand on a déjà et enfin commencé à gagner sa vie. Il faut accepter de retourner vivre chez Papa-Maman, parce que l'allocation de recherche ne permet pas de vivre autrement. Mes parents étant loin de Paris, contrairement à mes archives, ça me faisait une belle jambe, de retourner vivre chez eux. À moins de travailler, en acceptant une charge d'enseignement. Donc de faire une thèse à mi-temps, en... six ans donc. Et de s'entendre dire "Mais depuis que je te connais, tu fais cette thèse, et si tu te dépêchais de la terminer?!".

Voilà, c'est dit. Toutes mes plumes de canard n'ont pas poussé, la bêtise humaine s'accroche encore à moi, mais la métamorphose est en cours.


*** entendez par là, habilitée à se présenter à un concours pour devenir enseignant dans le supérieur ou plus précisément maître de conférence.
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10/06/2010

Quelque chose de kafkaïen...

Quand Artémise vous explique que la BnF Richelieu, c'est le parcours du combattant, ce n'est rien qu'une mauvaise langue. D'abord, parce que ce qu'elle décrit, c'était avant, et dans notre société du XXIe siècle, on sait bien que ce qui était avant, c'est tout pourri (ah non? Mais si, ce qui est nouveau est beau, c'est ce que nous clament toutes les publicités de la terre.) D'accord, ce qu'elle dit sur la délivrance des cartes de lecteur, c'est vrai. S'y rajoute le magasinier-surveillant de salle, qui à ses heures perdues, scrute dès votre arrivée, la date d'expiration de votre carte (ou son aspect) et vous renvoie à l'administration parce que votre carte est de l'ancien format et pas du nouveau-qui-vient-de-sortir (tout rouge à l'époque). Et par conséquent Vous-comprenez-Madame (enfin, non, ça elle ne me l'avait pas demandé, cette charmante femme, je crois qu'elle s'en tamponnait le coquillard, que je la comprenne) "il faut une nouvelle carte". Ce qui m'a valu de perdre une heure de travail pour aller chercher à l'administration le nouveau sésame. Et j'ai appris les jours suivants, que le changement n'était pas exigé là, tout de suite, maintenant. Que l'on avait bien quelques semaines pour changer nos petits bidules de plastique. Ce qui fait qu'un mois avant la date de renouvellement annuelle de ma carte, j'ai refait faire une carte, pour satisfaire une magasinière à tendance psycho-rigide (que moi, à côté, je suis coulante comme un vieux camembert).

Mais maintenant, il n'y a plus qu'une seule plaque. Et à part ça, les magasiniers sont très sympathiques. Bon sauf celle-là, celle à la carte rouge, qui ne sait pas seulement répondre quand on lui dit bonjour. Elle ne doit pas savoir que le mot existe. C'est la même qui fait tourner chèvre de nombreux lecteurs, en rendant les fiches auxquelles il manque une date (jamais de la vie, elle ne l'ajoutera, non mais! Elle n'est pas payée pour ça, non plus!), ou quand l'heure de fin de commande est dépassée d'une demie-seconde.

Les présidents de salle sont plus compliqués à amadouer. Il faut montrer que l'on a un sujet fascinant, enfin, qui les intéresse personnellement. En mettant du temps, en campant sur place (ou juste devant la porte des manuscrits), à force de persévérance, on finit par y arriver. Si, si.

Et je vous passe ceux qui ignorent superbement quelle est la profession des lecteurs. "Quoi, MCF, c'est quoi MCF ? Ce n'est pas un métier, ça!" Là, généralement, un collègue du président de salle intervient pour expliquer que "MCF" veut dire "Maître de conférence" soit une des trois ou quatre professions les plus fréquentes chez les lecteurs de Richelieu. No comment.

En vrai, Artémise a raison dans les grandes lignes. Mais il y a pire (il y a toujours pire). Par exemple à la grande BnF (celle de Tolbiac), il y a des ouvrages "en mauvais état" (ah ce qualificatif...) qui ne sont communiqués que sur autorisation spéciale, et tenez-vous bien, pour une seule journée. Même s'il fait plusieurs tomes, votre vieux machin précieux. Et si jamais vous avez l'outre-cuidance de vouloir le consulter le lendemain... "Ah mais ce n'est pas possible, Madame! Il faut redemander une autorisation!" Là, on reste souvent abasourdi. L'autorisation que l'on a mis des jours à obtenir n'est plus valable. Il faut relancer la machine pour juste une seconde journée de consultation. Prolonger la consultation, mettre ce précieux document dans un coffre-fort en attendant le lendemain, non, non et non, pas possible.

Et là, en toute logique, vous bénissez deux choses:
- l'inventeur de l'appareil photo numérique
- celui ou celle qui vous prête, confie le sien. Ou vous-même, si vous vous en êtes offert un, dans cette éventualité précisément.

Cependant, vous pouvez vous heurter au président de salle, qui pousse de longs soupirs avant de vous laisser prendre ce cher ouvrage en photographie. Et si ça l'abîmait, hein ?
Comment, techniquement, vous ne voyez pas comment la chose est possible ? Ah mais peut-être que, si, enfin éventuellement...

Réfrenez l'envie violente que vous avez alors de 1/ lever les yeux au ciel 2/ soupirer de désespoir 3/ éructer de rage 4/ Expliquer que prendre en photo l'ouvrage évitera de nombreuses manipulations.

Restons calme. Ne nous fâchons pas. Pensez aux présidents de salle qui comprennent les avantages de la photographie. Il y en a, heureusement.
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14/05/2010

Le 14 mai 1610, rue de la Ferronnerie, il y a quatre cents ans


Si vous voyez quelqu'une dans la rue avec un crêpe noir, cela pourrait être moi. Il y a quatre cents ans mourrait Henri IV (alias Riton IV) et j'en suis encore toute chagrine. Goujat avec son épouse (et ses maîtresses aussi), mais roi d'exception, dont la légende a surtout été forgée depuis le XVIIIe siècle. Daniele Thomas, a soutenu en 1994, une thèse (L'iconographie d'Henri IV dans les ouvrages imprimés de 1589 à 1914 : évolution de l'image du premier Bourbon, roi de France et de Navarre", Université de Pau) qui met en lumière de façon très claire les évolutions de la légende du bon roi Henri. On peut aussi se reporter à la biographie de henri IV par Jean-Pierre Babelon (un peu ancienne à présent, 1982, hum, pas ébouriffante non plus, mais c'est la seule valable) et la biographie de Marie de Médicis, par Jean-François Dubost (pour le coup, l'oeuvre de Babelon prend un sacré coup de vieux et souffre de la comparaison), de 2009.

À sa mort, Henri IV n'est guère regretté par le peuple (ingrat!); il laisse un trésor à la Bastille, prouesse après la ruine de la France pendant les Guerres de religion, un pouvoir royal renforcé même si le pouvoir transmis à la reine en 1610 demeure fragile. L'histoire de la poule au pot provient d'après J. Cornette d'une visite du duc de Savoie dans les années 1590. Le duc, apprenant que les gardes du roi n'étaient payés que quatre écus par mois, proposa au roi, de leur offrir à chacun un mois de paye; ce à quoi le roi, humilié, répondit qu'il pendrait tous ceux qui accepteraient, et évoqua alors son souhait de prospérité pour les Français, symbolisé par la poule au pot.

Les faiblesses du pouvoir royal expliquent que, pour la première fois, le nouveau roi (Louis XIII encore mineur) se montre alors que le corps de son père est toujours exposé entre mai et juin 1610. Rassurez-vous, le corps a été embaumé, et l'on ne montre qu'un manequin d'osier au visage et aux mains de cires, revêtu des vêtements royaux. On lui présente néanmoins les repas... Jusqu'ici le nouveau roi ne se montrait pas avant les funérailles du précédent. Même s'il était pleinement roi, dès la seconde à laquelle le précédent souverain avait rendu son dernier souffle. 1610 est donc une date fondatementale dans l'histoire de France. D'ici à ce que tous les étudiants d'histoire de France et de Navarre (sic) la connaissent, ya encore du boulot, vu qu'un étudiant a trouvé le moyen en plein examen, après avoir étudié l'Europe de l'ouest au XVIe siècle de chercher laborieusement et vainement la date de 1515. J'ai failli faire le sketch de Robert Lamoureux, mais hum... je me suis retenue quand même.

Alors je soigne ma tristesse par une présentation des commémorations en l'honneur de mon Riton. La nouvelle revue électronique Europa Moderna, revue d'histoire moderne et d'iconologie prépare son prochain numéro avec un appel à contributions consacré aux années 1610-1615 et à l'après-assassinat de Henri IV. Vous trouverez ici un récapitulatif des évènements en France et dans le monde, avec de la musique, des expositions, une bibliographie. Je soupire de pouvoir acquérir deux ou trois CD (mon cri en ce moment "Du Caurroy ou je meurs") et faire un pélerinage rue de La Ferronnerie et passer des vacances à Pau... notamment pour aller voir l'exposition dont parle La République des Pyrénées.

J'oubliais le numéro que la revue L'histoire a consacré à mon Riton en février 2010, numéro 351.


Voilà! C'est tout pour aujourd'hui... Bon week-end !
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10/05/2010

L'histoire en image




Petite découverte du soir, à partager, le site L'histoire par l'image. L'objectif est simple:

L’Histoire par l’image explore l’Histoire de France à travers les collections des musées et les documents d'archives.

Ce site s’adresse aux enseignants et à leurs élèves mais aussi aux curieux et à l'amateur d'art et d'histoire (...) Il s'est donné l'ambition d'enrichir la connaissance du passé à travers les œuvres d'art et les documents iconographiques qui s'y rapportent. Bien des œuvres, quelle que soit leur nature (peinture, sculpture, photographie, dessin, gravure…), restent trop souvent utilisées comme de simples illustrations et méritent d'être analysées au-delà de la brève légende qui les accompagne le plus souvent. Ces œuvres ne renvoient pas seulement aux événements marquants de l'histoire de France (révolutions, guerres, changements de régime…). Les artistes des siècles passés nous ont en effet laissé une somme remarquable de témoignages sur les grandes évolutions sociales et culturelles que la France a connues depuis la Révolution. Même si ces témoignages émanent d'une sensibilité personnelle et ne peuvent prétendre à l'exigence de scientificité de l'historien, les œuvres d'art nous révèlent bien souvent ce qui anime la société d'une époque, ses motivations, ses moeurs, ses craintes ou ses engouements. Bien que privilégiée, l'histoire politique n'est donc pas exclusive ; une large place est accordée aux œuvres représentatives des réalités d'une époque et de leur évolution dans le temps (conditions sociales, progrès scientifiques, pratiques religieuses et culturelles, vie intellectuelle et artistique...).



En tant que moderniste, je gromeule contre les bornes chronologiques (1789-1939), mais je salue ce travail, vraiment fabuleux, qui permet de musarder dans les oeuvres d'art de façon intelligente, pour y apprendre beaucoup sur l'histoire de la société et la culture politique des XIXe et XXe siècles... Cela ma rappelle l'usage bête que la plupart de mes professeurs d'histoire faisaient, quand j'étais au collège et au lycée, de ces fameuses gravures révolutionnaires: elles étaient considérées comme portant la vérité, sans en profiter pour faire travailler notre esprit critique sur ces documents nouveaux à l'époque et produits de propagande acides.

On peut faire une recherche thématique, ou bien chronologique, par index, ou en mode "recherche avancée" pour combiner plusieurs critères de recherche. Bonne visite !
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23/04/2010

Escalier de la BnF : F. Mitterrand demande un contre-projet


J'ai vu il y a quelques jours un article du Monde en date du 6 mars 2010 qui annonçait que le ministre de la culture devait rendre son avis quant à la destruction de l'escalier d'honneur de la BnF, (que l'on doit à Jean-Louis Pascal) le 17 avril. Hier, un article du Figaro (22 avril 2010) annonçait que F. Mitterrand demandait un contre-projet, à fournir d'ici à novembre 2010. Le sort de l'escalier n'est donc pas scellé, et c'est très très bonne nouvelle ! Je vais entamer immédiatement une gigue, et je n'exclue pas de la danser avec pour seule parure une ceinture de bananes ! Il faut savoir marier les genres !

Cette suspension de la destruction prévue, est une nécessité pour respecter l'oeuvre de Jean-Louis Pascal. J'ai été très heureuse d'apprendre que Jean-Pierre Babelon notamment s'est élevé contre ce projet. Mais c'est peut-être aussi une simple mesure d'équité face aux citoyens qui, habitant des immeubles classés (ce qui arrive facilement à Paris, et ne rend pas plus riche :-/ ), ne peuvent pas installer de volets, ou doivent batailler pour changer leurs fenêtres et trouver des modèles agréés par les Monuments historiques. Le respect de l'oeuvre de J.-P. Pascal prime naturellement. Mais il serait bon de ne pas oublier ou négliger le principe d'égalité entre citoyens face à la loi...

Sur ce rayon de soleil, je vous souhaite une bonne journée... (de travail)
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18/04/2010

Éducation (encore)


Un rapide billet pour parler éducation. Vouaip, encore! Mais on ne peut pas enseigner sans aborder le sujet, et thésarde ou pas, j'enseigne. À ce propos, si vous ne l'avez pas encore lu, voici un billet de Princesse Soso sur le sujet : "si jamais Luc C. passe par ici". Il était signalé sur le blog de La cité des Dames, par Artemise, avec injonction de le lire et de le diffuser. Je ne me fais pas prier parce que, même si on n'aime pas ou peu le style de Princesse Soso, que l'on comprenne ou pas qu'elle utilise (beaucoup) le second degré (moi, ça ne me dérange pas, je vois un peu ce qu'elle vit, et ça explique la chose), c'est un résumé très sensé. Largement plus que ces assises de la violence sans y avoir invité de prof de ZEP...

À ce sujet, l'émission Interception du jour, sur France Inter, démontre l'implication de certains tribunaux pour faire comprendre aux parents d'enfants sur le chemin de la délinquance le rôle des parents, et les principes d'éducation. À écouter donc.

Le constat est banal : de plus en plus de parents ont du mal à assumer leur rôle face à des enfants au mieux turbulents, au pire incontrôlables, violents, voire en voie de délinquance.

Pour aider ces parents avant que tombe une éventuelle sanction pénale, une loi de mars 2007 permet aux tribunaux d’organiser des stages.

« Stages parentaux » menés par des magistrats, des psychologues, des éducateurs sociaux. Il ne s’agit pas de ramener les enfants dans le droit chemin, il s’agit d’ouvrir les yeux aux parents désemparés ou tout simplement inconscients de leurs devoirs.

Ces stages ne sont pas organisés sur la base du volontariat : les parents convoqués par la justice, et qui s’y soustraient, sont passibles des condamnations classiques pour les délits commis par leur progéniture.

Le tribunal de Reims est l’un des rares en France à appliquer cette formule. Monique Derrien a suivi de bout en bout l’un de ces stages.

Elle a recueilli le désarroi, la colère aussi de parents sans repères, souvent en grande difficulté sociale, que l’on tente d’aider, parfois malgré eux.


Dommage que les enseignants ne soient pas présents à ces séances, car c'est un travail d'équipe et une explication sur les rôles de chacun. C'est fou comme la responsabilité de l'école revient dans la bouche de ces malheureux parents. Ça me rappelle des choses, ça.

Et contrairement à ce qui est dit dans le cours de l'émission par un... éducateur ? Psychologue ? Il y a une règle magique dans l'éducation, à condition de la respecter: "Face à un enfant, ne dis que ce que tu es prêt à faire et fais tout ce que tu dis". Que l'enfant croit la parole de l'adulte et que l'adulte se fasse respecter sans violence. Merci Pierre de m'avoir donné, un jour, cette règle...

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17/04/2010

Causons musique (1)





Écoutez ! C'est l'Arpeggiata....

Depuis quelque temps, je voulais changer le programme musical. Vous faire écouter des choses un peu plus récentes, comme Lhasa. Voui mais c'était sans compter avec la limitation de l'écoute imposée par certaines maisons de disques, la Warner et EMI. Pas drôle. Du coup, je me suis rabattue sur un excellent disque, et un aussi excellent ensemble, l'Arpeggiata (j'ai du mal à l'écrire mais je les écoute avec un régal sans nom)... Pour en savoir plus sur eux, c'est ici que ça se passe, quant à ce disque-là, il est question d'araignée, de tarantule plus exactement, de malades piqués par ces p'tites bêtes, et de la culture développée en Italie autour de ce thème... Un régal, je vous dis.

Leur disque autour de la musique de l'époque de Stefano Landi est également à connaître, c'est simple, ça me fait chanter quand tout va mal. Quand j'étais étudiante je mettais ça à fond les soirs de blues estudiantin (mes voisins étaient étudiants et eux, ça n'était pas leur genre de musique, c'était pour leur culture, donc). Et paf! ça repartait...
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16/04/2010

Le minutier central ou une souris perdue dans des écritures de chats...


étape 1 : Prenez une souris. Non pas par la queue, un peu de respect, s'il vous plaît! Gentiment, doucement. C'est très doux le poil d'une souris, j'ai vérifié récemment avec celles rapportées par mon chat.

- étape 2 : Lâchez-la dans... voyons... un tas d'archives, à peine rangées en cartons. Quand je dis un tas, c'est un gros tas. Qui va chercher dans les 100 à 200 000 cartons. Pas de fromage à grignoter, mais largement mieux, des tas de vieux papiers. Laissez-la quelques années, le temps d'une thèse.

- étape 3 : au bout de tout ce temps, récupérez-la et en la regardant bien droit dans les yeux, demandez-lui des nouvelles de sa santé.

J'ai fait l'expérience, et ce n'est pas beau à voir. Ce n'est pas qu'elle est morte de faim, la souris, c'est qu'elle n'a plus su où donner de la dent. Trop de cartons. Plus moyen de se rappeler où elle avait grignoté. Ça se brouillait un peu dans son cerveau.

Comme dans le mien (de cerveau). Étant donné le temps passé dans les archives des notaires parisiens, j'ai l'impression, non de me transformer en souris, ça c'est déjà fait, mais de ne plus savoir où donner de la dent. Ce fonds des archives nationales porte le nom de "Minutier central". Pour en savoir un peu plus, c'est ici que ça se passe (cliquez). Vous allez voir, c'est très simple (groumph ya arnaque, accrochez-vous).
Imaginons que l'on travaille sur... les boulangers au XVIIe siècle. Le commerce du pain enrichit-il ? Comment s'approvisionnent-ils, à qui et comment vendent-ils ? Quels pains vendent-ils ?

- D'abord on peut commencer par repérer le secteur géographique qui nous intéresse dans Paris, avec la carte des études notariales (salle des références des Archives nationales, premier étage).

- Ensuite, on cherche les notaires dont l'étude se trouvait dans le coin. Avec un peu de chance, les boulangers sont allés à l'étude du coin de la rue.

- Là, on grimpe au troisième étage, salle des microfilms, chercher des détails sur les différentes études, dans les classeurs marrons, on relève la liste des notaires en exercice pour la période étudiée, leurs années d'activité, leur nombre de registres versés aux archives.

- En fin de classeur on va voir si ces gentils notaires ont laissé des répertoires, sortes de tables des matières des actes passés, noms des clients, type d'acte, année, mois, folio...
Les aléas du temps et peut-être la négligence desdits notaires font que l'on n'a pas toujours de répertoire. Alors, c'est la misère. Il faut se faire les cartons dans leur intégralité. Et ça n'est pas très très drôle. Ça peut l'être quand on a son temps, ce qui n'est pas le cas pour une thèse par exemple. Ça ne l'est pas quand les archives notariales ne sont qu'un petit bout de votre documentation.

- Si répertoire il y a, direction les tiroirs à microfilms. Avant il fallait les commander, maintenant, plus besoin d'intermédiaires, on ne s'en plaidra pas. Puis direction le lecteur de microfilm. Là, on fait défiler la bobine. On note les actes relatifs à nos boulangers. Là, c'est fait ! (nota, ne pas s'appesantir sur le bitoniau du lecteur, le défilement rapide a vite fait de s'enclancher, et là c'est encore la misère pour retrouver à quel page vous en étiez... Si vous entendez un brusque emballement de bobine, suivi de jurons de charretier lancés par un lecteur, c'est ce qui vient de se passer)

- Avant de quitter la salle, on repasse auprès des classeurs noter à quel numéro de carton correspond quelle année.

- Puis on passe commande des registres et cartons repérés. Ouf!

- Là, vous avez droit à une pause (au rez-de-chaussée). En même temps, vous n'aurez pas votre commande avant une heure et demie. Et ça ferme à 16h30, alors, autant se lever de bonne heure. Adieu les bains moussants du matin, théière à la main...

- Au bout de l'heure et demie, vous avez votre premier registre, au premier étage... C'est là qu'il faut prier tous les saints du paradis, saint Honoré en tête, pour la circonstance, parce que ça va être un quart d'heure drôlatique, de s'habituer à l'écriture du notaire, qui pouvait être dans une phase "écriture de chat"...

-Répetez l'opération autant de fois que nécessaire pour épuiser votre sujet, et quand vous aurez tellement de feuilles de relevé que ça volera de partout, vous me comprendrez...

À tel point que de tableaux en fiches, et de fiches en tableaux, de feuilles imprimées en notes manuscrites au crayon s'il vous plaît (qui tendent donc à s'effacer à force d'être manipulées) notes nerveuses et exitées, notes serrées ou exaltées, on ne sait plus toujours ce que l'on a dépouillé. Être ordonnée ou ne pas être (historienne), telle est la question.

Quelquefois une cote parasite vient semer la pagaille. Du genre, la référence d'un carton 281 pour l'étude LXI qui est censé traiter d'après vos notes, l'année 1634. Voui mais non. Ça ne colle pas, le carton 281 traite de l'année 1701. Il y a maldonne, vous en conviendrez avec moi.

Mais le Dieu des souris ayant créé l'archiviste, qui a créé la base de données au service du minutier, un rayon de lumière jaillira dans un coin de votre cerveau, et après quelques recherches dans la base joliment baptisée "étamin" (comme étamine) en croisant l'année de votre acte recherché (1634) et le numéro du carton, vous apprendrez tout penaud, que l'étude qui vous intéresse, ce n'est pas la LXI, triple buse que vous êtes, mais la LXII. Et voilà le travail.

Il y a des jours où je bénis les achivistes. Pas tous les jours ni tous les archivistes, mais quelquefois et quelques-uns.
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18/03/2010

Destruction programmée de l'escalier d'honneur de la BnF Richelieu / Fermeture du Cabinet des Médailles


Nous vivons toujours une époque fabuleuse... Dans le cadre des travaux en cours sur le site de la BnF Richelieu - site historique de la première bibliothèque royale puis nationale - l'escalier d'honneur, ici en photo, doit être détruit, ou comme on dit avec un faux air pudique "démonté". Il a été inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques. Je l'aime pour sa simple et majestueuse beauté, moi. Son fer forgé est un sujet d'admiration pour moi, à chaque fois que je le prends. Oui mais voilà, il faut de la place pour un caféteria, et probablement pour les délires d'un architecte mégalomane...

La Tribune des archives en parlait en mars 2009, ainsi que le site de l'association de défense du Cabinet des Médailles, un des musées qu'abrite la BnF Richelieu.

Car le musée des médailles va aussi disparaître... Vous trouverez sur le même site de l'association du cabinet des Médailles des précisions.

Le projet prévoit en effet la disparition de « l’entité Musée » et de ses salles d’exposition, et la mise en réserves des 1.500 œuvres actuellement exposées.
(...) La galerie Mazarine, où seraient installées une dizaine d’œuvres, et qui est présentée par la direction comme un substitut au Musée, est prévue dans les plans de l’architecte Bruno Gaudin comme une voie de circulation, non comme un musée (dont l’espace serait de toute façon insuffisant pour accueillir toutes les œuvres). Le coût d’un aménagement muséal de cette galerie dite pompeusement « Galerie des trésors » n’est de toute façon pas inclus dans le budget du projet Richelieu.

L'information semble être restée encore confidentielle, façon polie de dire que tout le monde s'en tamponne le coquillard (expression attestée depuis le XVIe siècle, voire le Moyen Âge).

Lisez l'argumentaire médiocre de la BnF (confort, fluidité, mal placé, créer des ouvertures). Les chercheurs de tous âges sacrifient volontiers leur confort et préfèrent prendre leur canne que d'entendre cela. On se souvient du type d'argumentaire qui a fait détruire les beaux dépôts Napoléon III aux Archives nationales (modernisation...). Contentez-vous de mettre l'électricité aux normes, d'arranger les problèmes d'incendie et de repeindre les fenêtres extérieures qui en ont bien besoin !

Depuis, la commission des Monuments historiques devait donner son avis. La destruction est bien prévue.

La revue "Sites et Monuments" fin 2009, début 2010 a consacré un article (d'Anne Richard-Bazire) à ce sujet, qui se termine par ces phrases :

Cette destruction va laisser un grand vide, l'avant-projet le dit lui-même: "Le hall se veut désormais être un grand vide hospitalier, un silence au coeur du quadrilatère." L'escalier est pourtant inscrit depuis 1983 à l'Inventaire supplémentaire des monuments historiques, ce qui n'a cependant pas empêché qu'on le transforme en 1987, date à laquelle on fait passer la volée supérieure de gauche à droite pour laisser monter des ascenseurs. Le XIX° siècle va-t-il pâtir une nouvelle fois de sa mauvaise réputation de siècle du pastiche et de l'éclectisme ? Et s'apercevra-t-on trop tard, comme pour les Halles de Victor Baltard (1805-1874), que l'on a détruit un témoignage important de l'oeuvre de l'architecte chéri de Charles Garnier, Jean-Louis Pascal, au moment où son oeuvre - magistrale - est en train d'être redécouverte ?


(Note de la rédaction de la revue )
Au moment où nous mettons sous presse, nous apprenons que la commission des Monuments historiques réserve son avis sur la destruction de l'escalier de Pascal. Elle va effectuer une visite de la Bibliothèque le 2 novembre prochain [2009] et va revoter à ce sujet.

Tout cela pour installer notamment une cafeteria (pourquoi pas mais à quel prix ? Pour y payer le sandwich pomme café près de 10 euros comme à Tolbiac?)
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